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Jocari (latin iocari s’amuser, iocus jeu)

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Sénèque, De la tranquillité de l'ame, XVII, 4-8

Texte

[4] Nec in eadem intentione aequaliter retinenda mens est, sed ad iocos deuocanda. Cum puerulis Socrates ludere non erubescebat, et Cato uiuo laxabat animum curis publicis fatigatum, et Scipio triumphale illud ac militare corpus mouebat ad numeros, non molliter se infringens, ut nunc mos est etiam incessu ipso ultra muliebrem mollitiam fluentibus, sed ut antiqui illi uiri solebant inter lusum ac festa tempora uirilem in modum tripudiare, non facturi detrimentum etiam si ab hostibus suis spectarentur.

[5] Danda est animis remissio : meliores acrioresque requieti surgent. Vt fertilibus agris non est imperandum (cito enim illos exhauriet numquam intermissa fecunditas), ita animorum impetus assiduus labor franget ; uires recipient paulum resoluti et remissi. Nascitur ex assiduitate laborum animorum hebetatio quaedam et languor. 

[6] Nec ad hoc tanta hominum cupiditas tenderet, nisi naturalem quamdam uoluptatem haberet lusus iocusque. Quorum frequens usus omne animis pondus omnemque uim eripiet: nam et somnus refectioni necessarius est, hunc tamen si per diem noctemque continues, mors erit. Multum interest, remittas aliquid an soluas.

[17,7] Legum conditores festos instituerunt dies ut ad hilaritatem homines publice cogerentur, tamquam necessarium laboribus interponentes temperamentum, et magni iudicii uiri quidam sibi menstruas certis diebus ferias dabant, quiddam nullum non diem inter otium et curas diuidebant. Qualem Pollionem Asinium oratorem magnum meminimus, quem nulla res ultra decumam detinuit: ne epistulas quidem post eam horam 1egebat, ne quid nouae curae nasceretur, sed totius diei lassitudinem duabus illis horis ponebat. Quidam medio die interiunxerunt et in postmeridianas horas aliquid leuioris operae distulerunt. Maiores quoque nostri nouam relationem post horam decumam in senatu fieri uetabant. Miles uigilias diuidit, et nox immunis est ab expeditione redeuntium.

[17,8] Indulgendum est animo dandumque subinde otium, quod alimenti ac uirium loco sit.(...)

Traduction

[17,4] Il ne faut pas non plus tenir toujours l'esprit tendu; il est bon de l'égayer quelquefois par des amusements. Socrate ne rougissait pas de jouer avec des enfants, et Caton cherchait dans le vin une distraction à son esprit fatigué des affaires publiques. Scipion, ce héros triomphateur, s'exerçait à la danse, non point en prenant des attitudes pleines de mollesse qui, par le temps qui court, rendent la démarche des hommes cent fois plus affectée que celle des femmes; mais avec la contenance de nos anciens héros, lorsqu'aux jours de fête ils menaient une danse héroïque, en telle façon qu'ils eussent pu, sans inconvénient, avoir pour spectateurs les ennemis mêmes de la patrie.

[17,5] II faut donner du relâche à l'esprit : ses forces et son ardeur se remontent par le repos. Aux champs fertiles on n'impose pas le tribut d'une récolte, parce que leur fécondité, toujours mise à contribution, finirait par s'épuiser ; ainsi, un travail trop assidu éteint l'ardeur des esprits. Le repos et la distraction leur redonnent des forces. De la trop grande continuité de travaux, naissent l'épuisement et la langueur.

[17,6] L'on ne verrait pas les hommes se livrer avec tant d'ardeur aux divertissements et aux jeux, si la nature n'y avait attaché un plaisir dont il ne faut pas abuser, sous peine de faire perdre à l'esprit toute sa gravité et tout son ressort. Le sommeil est nécessaire pour réparer nos forces, mais vouloir le prolonger et la nuit et le jour, ce serait une vraie mort. Il est bien différent de relâcher, ou de détendre.

[17,7] Les législateurs ont institué des jours de fêtes, afin que les hommes, rassemblés pour ces réjouissances, trouvassent à leurs travaux un délassement, une interruption nécessaires. Et de grands personnages, m'a-t-on dit, se donnaient chaque mois quelques jours de vacance ; d'autres même partageaient chaque journée entre le repos et les affaires. Je me souviens entre autres, qu'Asinius Pollion, ce fameux orateur, ne s'occupait plus d'aucune affaire passé la dixième heure ; dès lors il ne lisait pas même ses lettres, de peur qu'elles ne fissent naître pour lui quelque nouveau soin ; mais durant ces deux heures, il se délassait de la fatigue de toute la journée. D'autres, partageant le jour par la moitié, ont réservé l'après-midi pour les affaires de moindre importance. Nos ancêtres ne voulaient point que, passé la dixième heure, on ouvrît dans le sénat aucune délibération nouvelle. Les gens de guerre répartissent entre eux le service de nuit, et ceux qui reviennent d'une expédition ont leur nuit franche.

[17,8] L'esprit demande des ménagements; il faut lui accorder un repos qui soit comme l'aliment réparateur de ses forces épuisées. (...)

Texte et traduction : http://agoraclass.fltr.ucl.ac.be/concordances/sen_tranquillitate/lecture/17.htm

Datation
Ie siècle après J.-C.

Auteur
Sénèque, en latin Lucius Annaeus Seneca (Corduba en Espagne, 4/1 avant J.-C.- Rome, 65 après J.-C.), dit aussi Sénèque le Philosophe, Sénèque le Tragique ou Sénèque le Jeune pour le distinguer de son père, Sénèque l'Ancien. Philosophe de l'école stoïcienne, dramaturge et homme d'État.

Extrait de
Sénèque,  De tranquillitate animi, 17, 4-8 (Traduction française de la Collection Panckoucke; édition: M. Charpentier - F. Lemaistre, Œuvres de Sénèque le Philosophe, t. II, Paris, 1860).

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